L’urusengo est une flûte en bois fabriquée à partir d'une branche de l’umusekera ou de l’umusave. Elle a une forme conique et sa longueur moyenne est de 15 cm. Pour faciliter l’évidement de la branche, celle-ci est d’abord fendue sur sa longueur. Ces deux moitiés égales sont évidées de telle sorte que la forme conique naturelle de la branche soit conservée dans l’évidure. Ensuite, les deux parties coniques sont à nouveau assemblées et maintenues par une corde enroulée autour de la partie la plus grande de l’instrument. Enfin, l’ensemble est recouvert d’un morceau de trachée de taureau (umumiro) tendu par-dessus l'instrument. L’embouchure ovale fait environ 22 mm sur 25 mm et l’ouverture inférieure est de 4 mm.
La littérature orale fait mention de l’urusengo comme d'un instrument important pour les premiers bami (rois) : Gihanga l’aurait introduit sous le nom de Nyamiringa. Dans cette tradition royale, les joueurs d’urusengo étaient les abasengo, lesquels formaient un groupe avec les abatware (chefs), les abiru (mages) et les abasizi (poètes) pour escorter le roi lors de ses voyages. Les symboles royaux étaient : insengo, ingabe (tambour), inyundo (marteau) et umuvuba (flûte). L’insengo apparaît dans divers rituels, ce qui permet de conclure que l’instrument existait sans doute déjà au XVIIIè siècle. Outre sa fonction rituelle, l’insengo occupait aussi une place dans la vie quotidienne à la cour, où l’on ne jouait de cet instrument qu’en présence du roi.
L’origine de l’urusengo se situe probablement en Ouganda, où un instrument semblable est observé dans plusieurs royaumes (Nyoro, Toro, Nkore, Ziba). Ceci n'a rien d'illogique quand on sait que les frontières géographiques ont souvent été déplacées au cours de l’histoire, ce qui a aussi donné lieu à des influences culturelles réciproques.
Maintenant que la république a été proclamée au Rwanda, l’urusengo a perdu son caractère royal. Les compositions traditionnelles existent toujours, mais sont exécutées uniquement lors de fêtes ou autres événements organisés par le gouvernement.
Avant de jouer de l’urusengo, le musicien verse un peu de bière de banane dans l’instrument, ce qui est censé lui donner un son doux et clair: un usage assez répandu parmi les joueurs de flûte en Afrique. L’instrument est joué à bouche latérale, et on peut produire deux notes différentes en couvrant l’ouverture du bas. L’urusengo n’est jamais joué en solo, mais fait toujours partie d’un ensemble d’au moins cinq insengo.
Au sein de l’ensemble, on distingue trois types en fonction de la tonalité: l’ishakwe (aigu), l’inyahura (moyen) et l’ibihumirizo (grave). Le premier nommé est toujours seul et est utilisé par le chef du groupe; les deux autres types sont représentés par plusieurs instruments. Les phrases musicales sont formées par l’alternance rythmique d’un ou deux accords, l’inyahura et l’ibihumirizo jouant toujours ensemble, tandis que la voix aiguë, l’ishakwe, peut jouer des variations de rythme et de tonalité sur ce thème (malgré le fait qu’il ne dispose lui-même que de deux notes). Une chorale chante en même temps que l’ensemble instrumental et apporte une impulsion rythmique supplémentaire en frappant dans les mains.
Pour plus d’information consultez les publications du MRAC:
© KMMA/Jos GANSEMANS