Le keleli est un luth à deux cordes généralement confectionné par le musicien même. Sa caisse de résonance est constituée d'une calebasse hémisphérique ou d'une cuvette en bois ou en métal, sur laquelle est tendue une peau humide et souple de chameau, de chèvre ou de zèbre. Une fois la peau appliquée et attachée à de fines lanières de cuir, l'instrument est exposé au soleil, afin que la peau sèche et se tende. La table de résonance est pourvue de deux encoches et d'une ouverture destinées à la fixation du col. Ce dernier est réalisé en bois de dattier ou d'une autre essence flexible, et ne passe donc pas par la caisse de résonance mais bien par la membrane appliquée sur cette caisse. La largeur de l'encoche est à peu près équivalente à l'épaisseur du col, qui y est inséré. L'autre encoche est réalisée juste à côté de la grande entaille de 30 à 50 mm. La pellicule obtenue via cette ouverture est enroulée autour d'un petit rameau et repliée à l'intérieur de l'instrument. Le col traverse la peau pour la deuxième fois à ce niveau et y acquiert sa rigidité. Il arrive qu'un ou deux orifices sonores supplémentaires soient percés dans la peau à l'aide d'un poinçon brûlant. Les poils de la membrane sont soigneusement raclés.
La plupart des instruments possèdent deux cordes, accordées
à une tierce d'intervalle. L'éventuelle
troisième corde est accordée à une octave de la corde la
plus grave et appelée "chanterelle". Les cordes sont
généralement réalisées à partir des
tendons d'une chèvre ou d'une gazelle, mais parfois aussi
de nylon. Les deux cordes sont, en fait, constituées d'un seul
long tendon, et enroulées puis fixées au sommet du col du
keleli à l'aide de tendons plus courts. La corde même
passe à l'autre extrémité du col, où elle
est tendue. La chanterelle est également fixée aux deux
extrémités.
Le keleli est un instrument personnel: chaque luth a son musicien et
n'est pas transmis. De même, les instruments ne sont jamais
vendus ni négociés. Le don ou le prêt sont
éventuellement possibles.
Le keleli se joue assis ou à moitié couché, avec
la caisse de résonance sur le sol ou sur le pied ou la jambe du
musicien. La main gauche maintient les cordes tandis que la droite les pince.
L'interprétation relâche la tension des cordes et
désaccorde l'instrument petit à petit. Lorsque la hauteur
tonale s'écarte trop de sa valeur originale, le musicien
arrête de jouer pour réaccorder l'instrument.
Le jeu instrumental consiste généralement en un solo,
mais il est parfois enrichi de sons vocaux, d'une sorte de
bourdonnement sur la lettre "zzz", ou du chuchotement bas et
silencieux d'un texte.
L'utilisation du keleli fait partie de l'éducation des
jeunes. L'apprentissage s'effectue en partie via
l'écoute et l'imitation, mais surtout via
l'étude personnelle. L'instrument est joué de la
circoncision à l'âge moyen. Les hommes plus
âgés n'en jouent pas.
Il existe un répertoire fixe que les jeunes apprennent, et dont
80% est joué sur le keleli à deux cordes et 20% sur le keleli
à trois cordes. Les principaux chants sont: asilim, gini, bazabaza,
kele, kae, toru, tardena, dogodoma, susuma, tin, tumtum.
La structure du luth keleli est fort semblable à celle de la
vièle kiiki.
La différence réside dans le nombre de
cordes: le luth en compte deux ou trois, tandis que la vièle
n'en a qu'une. Le mode d'utilisation est également
différent: le luth est pincé et la vièle,
frottée.
Voir également: BRANDILY, M., Instruments de musique et musiciens instrumentistes chez les Teda du Tibesti, MRAC – Annales, Sciences humaines, vol. 82, 1974
© KMMA/Monique BRANDILY